LE CHRISTIANISME EN IMAGE :

SYNOPSIS 1

Des origines à la première moitié du 12e siècle

 

L’art chrétien n’est pas celui du seul Occident, ni celui de l’Orient seul. Et pour différents qu’ils soient, il est temps de reconnaître que les arts chrétiens d’Orient et d’Occident, ont tout de même en commun d’être tous deux chrétiens !

 

Le christianisme, comme il peut s’exprimer par le verbe, peut aussi s’exprimer par le silence, la musique, mais aussi par les formes et les couleurs.

 

Catacombe romaine de la Via Latina, 3e s. Résurrection de Lazare.
Catacombe romaine de la Via Latina, 3e s. Résurrection de Lazare.

Les plus anciennes images chrétiennes qui nous soient parvenues, remontent aux 3e et 4e siècles. Ce sont celles des catacombes romaines et des sarcophages. Elles empruntent leur langage à l’antique, mais lui insufflent un nouvel esprit.


L’image, empruntée aux apparences du monde, se simplifie souvent à l’extrême, éliminant les détails et se détournant de tout illusionnisme : seul le sens compte.


Le monde ne fournit plus qu’un vocabulaire pour s’exprimer par paraboles, inciter à la méditation des Ecritures ou à la contemplation des mystères.


 

Sant'Appolinare Nuovo, Ravenne, 6e s.
Sant'Appolinare Nuovo, Ravenne, 6e s.

L’art chrétien ne trouve vraiment son langage que suite à sa reconnaissance par l’Empire romain, au début du 4e siècle.

Il sort alors de l’ombre, pour être magnifié au grand jour, par de somptueux édifices.


L’essentiel de ce qui nous est parvenu de cet art, se trouve aujourd’hui à Ravenne.


Mais les traces qu’il en subsiste ailleurs, permettent de supposer, qu’en dépit de la scission en Empire d’Orient et d’Occident, ceci ne devait pas, pendant longtemps, avoir de répercussion sur l’unité de la foi ni de l’art sacré. Cet art n’était sans doute pas très différent à Rome, à Constantinople ou à Alexandrie.


 

L’art chrétien forge son langage en éliminant de l’antique tout illusionnisme superflu : semblant de perspective, proportions, modelé, espace tridimentionnel…

Ce dépouillement sera une constante de l’art chrétien pendant presque mille ans. Pendant des siècles, il ne cessera d’aller vers une stylisation accrue, privilégiant toujours le message par rapport au rendu du visible, et tendant vers une écriture par pictogrammes.

Pendant mille ans, les chrétiens ont voulu, et cela d’un bout à l’autre de la chrétienté, se laisser conduire par la Grâce.

Sur le mur blanc ou la tablette enduite, leur main ne voulait être guidée que par l’Esprit. Ils n’étaient pas dans le faire, mais dans le recevoir. Leur vigilance n’était orientée ni vers le rendu des apparences, ni vers l’expression de leur pensée ou de leur sentiment propres. Il s’efforçaient de s’effacer pour laisser place à la Parole.

 

Toutefois très tôt en Occident, l’importance ontologique de l’image avait été minimisée par les autorités ecclésiastiques, au profit de son rôle pédagogique, devenant une sorte de pis aller par rapport au langage, la Bible « des illettrés ».

 

Pendant ce temps en Orient, au contraire, l’image était promue au rang de doctrine fondamentale, objet d’un débat théologique essentiel, au point d’opposer pendant plus d’un siècle ( de 730 à 843 ), ceux pour lesquels l’image était sacrée à ceux qui auraient voulu la voir disparaître. Au point que le triomphe des images allait s’identifier au Triomphe même de la foi orthodoxe !

 

Ces deux conceptions opposées auront des conséquences à long terme.

 

Mais jusqu’à la moitié du 12e siècle, rien n’oppose vraiment l’esprit des images d’Orient et d’Occident. Les styles en sont extrêmement variés, car extrêmement vivants. La distinction entre art préroman et roman d’un côté, et byzantin de l’autre, est souvent discutable. Elle anticipe en bonne part le schisme qui ne sera consommé qu’au 11e siècle, sans conséquence immédiate sur les mentalités, et par conséquent sur l’art. Longtemps encore, les différences seront plus sensibles entre grands centres et provinces reculées

 

Baiser de Judas, à Vic dans l'Indre, 12e s.         Baiser de Judas à Gülsehir en Cappadoce, 10e s.
Baiser de Judas, à Vic dans l'Indre, 12e s. Baiser de Judas à Gülsehir en Cappadoce, 10e s.

Certaines fresques de Cappadoce sont plus proches d’autres dans le Berry, qu’elles ne le sont parfois de l’église voisine. Cette réalité a parfois gêné les savants. Ils l’ont alors attribué au déplacement des artistes. Celui-ci n’est pas à exclure, mais ne saurait tout expliquer. Il y a des familles et des rencontres d’esprit qui ne tiennent pas à la culture locale.

 

On peut tout au plus distinguer deux grandes tendances : l’une plus dynamique en Occident, l’autre plus hiératique en Orient. Le dynamisme extraordinaire qu’on trouve dans les fresques du porche de Saint Savin n’a pas d’équivalent en Orient. Pas d’équivalent non plus en Orient, de cet écartement de toute dimension esthétique au profit du sens seul, comme à Tavant.

 

Anges de l'Apocalypse, St Savin/Gartempe, 12e s. Tavant, 12e s. Ste Sophie de Kiev, 12e s.
Anges de l'Apocalypse, St Savin/Gartempe, 12e s. Tavant, 12e s. Ste Sophie de Kiev, 12e s.

En tous cas, aussi divers qu’il soit, l’art chrétien de ces temps reculés a en commun un même souci d’effacement devant le Transcendant, d’imposer silence aux pensées et aux sentiments propres, pour servir la seule communication de l’orant avec Dieu.

 

Pour lire la suite, cliquer sur le lien suivant :